Des copains d’enfance, que les choses de la vie font travailler ensemble. Ensemble dans les stups l’un pour les flics, l’autre pour les trafiquants. Un monde d’angoisse, de violence et de trahison qui fait rapidement oublier que frères ennemis, ils sont. Impossible d’avoir l’esprit tranquille pour faire son business, d’un autre côté, ils ont peu de règles à respecter.
Des stups, une cité & un guet-apens
Un très bon polar avec une intrigue bien montée et crédible, même s’il m’est difficile d’en juger. On voit la cité et la fatalité. On voit la famille et les clans. Tout le tralala folklorique qui vole en éclats quand il s’agit de gros sous. Il n’y a ni Dieu, ni frère, ni quelconque code de l’honneur. Il y a l’argent et le panier de crabes que l’appât du gain crée. Cela se passe à Paris, mais Frères ennemis nous fait penser aussi au film Bac Nord.
Un guet-apens qui bute l’un d’entre eux. Au passage, les trafiquants ont une très belle planque dans un grand appartement du 16e arrondissement. Guet-apens ou braquage je disais, dès le début du film et l’histoire est lancée. Plans rapprochés, très rapprochés à la caméra pour suggérer la course haletante, le cœur à 200 pulsations minutes.
Caméra presque subjective. Parfois le réalisateur filme une course comme si la caméra courait. Comme si on avait voulu prendre la scène avec son téléphone, en courant. On n’y voit rien mais on comprend tout et c’est juste.
Frères ennemis parce que trafiquants
Trafiquant c’est être une cible et le film le rappelle avant d’être un flambeur. Quelle vie de merde pour une poignée de dollars. Une vie courte qui ne s’arrête jamais pour finir encore plus vite. Le film rend compte de tout cela. Que les acteurs soient frères ennemis est juste un détail romanesque qui permet à Reda Kateb, le flic, de rentrer dans la cité sans prendre un congélateur sur la tête. Leur lien présent ou absent n’aurait rien changé à cette vie et cette violence crues. Au passage, le flic s’en tire, c’est lui l’exemple de l’ascension républicaine, lui qui a choisi le droit et la justice et pourtant ses parents sont des parias dans le quartier parce qu’ils sont parents de flics.
Cela serait presque un film pédagogique pour convaincre les jeunes fascinés par l’argent facile de faire des études et de ne pas sombrer dans le trafic. Un travail de Sisyphe.
Le glauque excellemment rendu
On ne peut s’empêcher de penser que c’est le consommateur qui rend ceci possible. Le consommateur qui génère les ventes, les gains des réseaux, les règlements de compte. Le volume d’argent proportionnel au volume de drogue et à l’intensité de la violence. Violence qui ne se limite pas à la France mais à tout le parcours de la drogue sur des milliers de km. Frères ennemis se limite à la France. Je pense à toutes ces dépêches ici et là en France, encore un règlement de compte, deux personnes abattues… la guerre du trafic reprend. Des trucs qu’on entend à la radio de loin en préparant le dîner du soir, ou des notifications sur son portable qu’on swape aussi vite que les vies des victimes sont passées.
Le film finit comme on tourne une page d’un magazine avec la même chose qui continue la page suivante. Une simple tranche de vie. La mort et la peine des uns n’arrêtent pas la cupidité des suivants.
Bien entendu, on peut avoir une vision simple du film, Frères ennemis est un très bon polar avec une bonne intrigue bien montée qui se dénoue lentement sans que cela ne soit si évident au départ. La réalisation, le scénario et les jeux d’acteurs sont excellents.
Je vois la tristesse d’une époque qui a besoin de plaisirs artificiels dont l’organisation a été donnée à une autre France.
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